Subventions à Airbus : pourquoi Washington s’en prend aux fromages italiens
La liste des nouveaux droits de douane américains contre les produits européens touche essentiellement les pays du consortium Airbus… mais aussi l’Italie. Washington attaque notamment les fromages italiens, sans raison apparente.
Mais l’administration américaine s’en est aussi pris à l’Italie, dont les exportations de fromage devraient être taxées à partir du 18 octobre. Le parmesan, le pecorino romano et le provolone seront les principales victimes italiennes de l’appétit trumpien pour les droits de douane. En comptant les autres produits alimentaires taxés à l’échelle européenne par Washington et qui sont aussi exportés par l’Italie, comme certains yaourts ou fruits, ces nouvelles sanctions devraient coûter entre 500 millions et un milliard d’euros à l’Italie, selon les premières estimations de la presse transalpine.
Le « Made in Italy » en danger ?
Le « Made in Italy » est en danger, se sont écriés les autorités italiennes à l’annonce de ces taxes. Surtout, Rome s’est très officiellement étonné d’être frappé au même titre que les quatre pays du consortium Airbus. Le ministre des Affaires étrangères, Luigi Di Maio, a rappelé que le pays « n’était pas concerné par cette affaire » de subventions illégales et a profité de la visite en Italie de son homologue américain, Mike Pompeo, pour appeler Washington à « faire des efforts ».
« Des droits de douane supérieurs à 20 % sont insupportables pour nos exportations vers les États-Unis », avait averti avant l’annonce des sanctions Cesare Baldrighi, président du Consortium de protection du grana padano. Les professionnels du secteur s’inquiètent tout particulièrement pour le parmesan. Pour obtenir le précieux sésame de l’appellation d’origine, il faut se soumettre à une très longue liste de critères, ce qui fait qu’il n’y a qu’un peu plus de 400 petits producteurs en Italie. Si le marché américain venait à se fermer, c’est toute la filière – l’un des symboles de la culture gastronomique italienne – qui serait menacée, explique le Financial Times. Pour écouler leur stock, les producteurs seraient obligés de baisser les prix, ce qui serait financièrement difficile à supporter pour des entreprises généralement de petite taille qui ont peu de réserves financières.
Une question d’appellation
Pour Cesare Baldrighi, Donald Trump profite de sa victoire dans le dossier Airbus pour lancer un assaut en parallèle sur les appellations contrôlées. « En réalité, ce que les Américains veulent, c’est vendre du parmesan américain en Europe », assure-t-il au quotidien Corriere della Sera. Ce serait la raison pour laquelle l’Italie se retrouve sur la liste des pays frappés par les nouveaux droits de douanes.
L’administration américaine fait, en effet, l’objet d’une intense pression depuis plusieurs mois du lobby des fabricants de fromages américains en faveur de sanctions contre leurs concurrents européens. En mai par exemple, ce syndicat a adressé une lettre ouverte à Donald Trump assurant que l’UE abusait des « indications géographiques » pour protéger des appellations qui, comme « parmesan », seraient depuis longtemps entrées dans le langage courant. Ils assurent que le « parmesan » du Wisconsin (le principal État américain où ce fromage est fabriqué) n’a rien à envier à son homologue italien et ne devrait pas être interdit de vente sur le sol européen.
Pour les Italiens, l’attaque contre leur fromage ne serait en fait que la première étape d’une offensive plus générale de Washington contre le système européen de protection des appellations géographiques. En avril, le président américain avait d’ailleurs reconnu sur Twitter que si l’OMC venait à donner raison aux États-Unis dans le conflit entre Airbus et Boeing, il ne se priverait pas de s’en prendre à tous les domaines où l’Europe « a floué commercialement les États-Unis ». Les fabricants de camembert normand, de jambon de Parme ou encore du boudin blanc bavarois n’ont qu’à bien se tenir.